Lecture
Les deux premiers tomes de "La Traversée des Temps" de Eric-Emmanuel SCHMITT sont sortis en Livre de Poche. Je viens de terminer le premier intitulé "Paradis Perdus"
Résumé :
"Raconter l'histoire de l'humanité sous la forme d'un roman : faire défiler les siècles, en embrasser les âges, en sentir les bouleversements… Depuis plus de trente ans, ce projet ambitieux occupe Éric-Emmanuel Schmitt. Accumulant connaissances et savoirs, créant des personnages forts et touchants, l’écrivain donne enfin naissance à La Traversée des temps et nous propulse de la préhistoire à nos jours, d'évolutions en révolutions, tandis que le passé éclaire le présent.
Paradis perdus ouvre cette aventure. Noam en est le héros, né il y a huit mille ans dans un village lacustre, au cœur d'une nature paradisiaque. Il affronte les drames de son clan, rencontre Noura, une femme fascinante, et se mesure à une calamité célèbre : le déluge, qui va déterminer son destin. Mais serait-il le seul à parcourir les époques ?
Un véritable roman d’aventures, avec une intrigue tragique et biblique. Magistral. Le Figaro.
Palpitant, enrichissant, drôle et tendre. On est pressé de lire la suite. Ouest-France.
Un syncrétisme de haute volée. Libération"
Ce que j'en pense :
éblouissant ! époustouflant ! passionnant ! jubilatoire !
L'auteur est un virtuose de la langue française. En plus de l'histoire et ses personnages attachants (ou pas), je me délecte de ce foisonnement de mots. Ex. p. 186 : "ça arrosait, ça piquait, ça délayait, ça imprégnait, ça ripait, ça arrachait, ça dégoulinait, ça noyait."
Tous nos sens sont en éveil.
Il fait revivre aussi des mots oubliés ou peu usités : contemption, hominité, trémulant, vaticination, méphitique, baguenauder, vieillardes, égrotantes... des mots qui évoquent des sons : onde cristalline, glouglouter, son tubé, trompeter etc...
Il y a de l'humour, de la tendresse, de l'amour et c'est si joliment dit.... cela n'empêche pas la trahison, les bagarres, la survie...
Il faut à tout prix le lire !
Je pourrais reprendre la phrase de Barak p.408 : "Je savoure ! je jouis ! Ah, quel spectacle !"
Extraits :
p.76-77 : "Un guérisseur est un traqueur spirituel. Il part à la recherche des traces ; son art consiste à bien observer."
p.91 : "Accuser de crétinerie ceux qu'on ne comprend pas revient à déclarer la sienne."
p.118 : "-Peut-on souffrir de solitude au milieu des siens ? (...) -Tel est le destin de l'homme qui pense par lui-même."
p.146 : "Je n'avais pas changé ma vie, mais mon regard sur ma vie."
p.223 : "Quand on ambitionne d'enchaîner les gens au moyen de cordes invisibles, on recourt à ce genre de légendes."
p.227 : "Le progrès n'est pas que l'histoire de la connaissance, il se révèle tout autant l'histoire de l'ignorance : il pratique l'aveuglement quant aux conséquences. Utopie prospective."
p.339 : "Si les hommes sont un champ qu'il sillonne, les femmes sont une forêt où il se perd. Il n'a jamais compris comment réagissent les femmes. A moins qu'il ignore comment il réagit aux femmes..."
p.370 : "Elle ne se contente pas de l'aider à vivre, elle lui apporte une raison de vivre."
p.493 : "- Demandez à Derek. Il n'existe aucune question pour laquelle il manque de réponse. On reconnaît les gens qui ne savent rien à cela : ils savent tout !"
p.528 : "Recommencer... L'idée afflige. Quand on recommence, la mélancolie freine l'allégresse : on pense davantage à ce qui nous manque qu'à ce que l'on crée. Tandis que, lorsqu'on commence, on s'élance."
p.541 : "Savoir ne consiste pas à supprimer le mystère, mais à le cerner. Savoir consisgte d'abord à savoir ce qu'on ne sait pas. Je dois enlever les couches superficielles, celles qui se résolvent, pour toucher le coeur concret du mystère."
p.554-555 : "Quel que soit l'âgee auquel on apprend la mort de ses parents, ce jour-là tue l'enfant. Devenir orphelin, c'est devenir veuf de son enfance."